samedi 9 mars 2013

Abd Al Malik : "La culture, une arme de paix"


Le plateau du Grand Théâtre de Provence (GTP) est livré aux techniciens, la salle est vide, forêt de fauteuils rouge impeccables. Entre les rangées se faufile une silhouette féline, celle d'Abd Al Malik arrivé hier à Aix-en-Provence pour y créerL'art et la révolte, un spectacle musical inspiré par l'oeuvre d'Albert Camus.
Une commande de Dominique Bluzet qui dirige le GTP et le Jeu de Paume à Aix, le Gymnase à Marseille. C'est l'un des temps forts de la Capitale européenne de la culture. Regard enveloppant et voix hypnotique, Abd Al Malik se raconte à travers les mots de Camus. Il parle de lui autant que de l'auteur qui guide ses pas d'homme et d'artiste. Il est porté par un "élan camusien", souffle-t-il.
Votre création est très attendue, ressentez-vous une pression particulière ?
Abd Al Malik : Ce qu'on fait est tellement beau, cette possibilité de partager avec les gens, de faire du lien... Non je ne ressens pas de pression mais une envie de donner envie, de lire notamment... Je considère que c'est un honneur d'être ici.
En quoi la rencontre avec Camus a-t-elle été décisive dans votre vie ?
A.A.M. : Elle a été vibratoire ! Camus dit que la culture l'a arraché à la misère, je pourrais le paraphraser. La culture m'a sauvé la vie. Il faut bien vous imaginer que quand je lis la préface de L'envers et l'endroit, j'ai 13 ans. C'est la période où, avec mon frère Bilal, on voulait faire du rap.
Et je considère que Camus s'adresse directement à moi et me dit "tu as la prétention d'être un artiste, voilà ce qu'un artiste doit être". Il parle du rapport au milieu d'origine, à l'argent, à l'engagement... C'était comme si je n'avais pas le choix, ce discours m'appelait. Pour moi, Camus était un grand frère de la cité.
Qu'est-ce qui a résonné aussi intimement en vous ?
A.A.M. : J'ai été élevé par une mère seule dans un milieu humble. Camus était un Français d'Algérie comme nous, les Français particuliers...
Mais vous vous sentez français à 100 %, vous ?
A.A.M. : Oui. Mais on me fait souvent sentir que je suis un Français particulier. Pour moi, c'est une richesse, ça s'ajoute à la culture, il faut comprendre ça. La culture est une arme de paix par excellence, elle est là pour construire, pas pour détruire.
Quel est l'écho actuel à l'oeuvre de Camus ?
A.A.M. : Camus a été très attaqué car ce qu'il disait - avançons ensemble - peut être difficile à accepter dans un monde clivant. Camus est très pertinent car aujourd'hui, on est dans un monde clivant qui prétend être intellectuel mais où est la raison ?
Vous qui êtes passionné par la lecture, comment allez-vous représenter le livre dans un spectacle musical ?
A.A.M. : Je lis beaucoup, la lecture est toujours une passion. Je ne voulais pas reproduire un spectacle de chansons tel que je peux le faire d'habitude mais je voulais jouer sur cet amour de la lecture. Là, elle est mise en scène, c'est organique, charnel à travers un vrai rapport à l'objet livre.
Musicalement, dans quels univers votre création nous emmène-t-elle ?
A.A.M. : La musique évolue pendant le spectacle, elle est plus urbaine au début, organique au milieu et plutôt classique à la fin. Elle suit la structure du spectacle qui se présente en trois tableaux. On part avec une sorte d'enfermement, ça s'ouvre sur la rencontre avec l'autre...

Du 12 au 16 mars au Grand Théâtre de Provence à Aix. Relâche le jeudi 14 mars. Réservations au 08 2013 2013. Puis en tournée, le 19 mars à Toulon au Théâtre Liberté et le 22 mars à Cavaillon. Retrouvez l'entretien Orange - La Provence avec Abd Al Malik le mercredi 13 mars sur LaProvence.com
Olga Bibiloni
LA PROVENCE.COM

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