Samia Ghali : "Patrick Mennucci rassemble les élus, je rassemble les Marseillais"
LE MONDE

La sénatrice Samia Ghali dénonce le soutien de Matignon à son rival, Patrick Mennucci, et se pose en "candidate antisystème" pour le second tour de la primaire socialiste à Marseille.
Trois des quatre éliminés du premier tour ont rejoint votre adversaire. Comment expliquez-vous votre isolement ?
Samia Ghali Je ne suis pas isolée. Les Marseillais ont été clairs lors du premier tour. Cette union est celle de ceux qui ont l'habitude des petits arrangements du PS. Comment Eugène Caselli peut-il se ranger derrière Patrick Mennucci après qu'ils se sont traités de menteurs ? Seul un accord d'appareil peut expliquer ces contradictions. Que Matignon se mêle de ces primaires me pose problème. M. Mennucci rassemble les élus, je rassemble les Marseillais. Je suis la candidate antisystème.
Pourtant, vous êtes au PS depuis 1983 et vous avez gravi tous les échelons du parti ?
J'ai gravi tous les échelons mais on ne m'a fait aucun cadeau. J'ai été aussi mise de côté au PS. Mais même quand il avait envie de m'éliminer politiquement, le PS a été contraint de se tourner vers moi. Parce que, sur le terrain, les habitants des 15e et 16e arrondissements me font confiance.
Cette primaire devait créer une dynamique. Le premier tour s'est bouclé dans une atmosphère nauséabonde. Quel bilan en tirez-vous ?
Je suis heureuse d'avoir près de 1 000 voix d'avance sur M. Mennucci, et 1 200 sur Marie-Arlette Carlotti, la candidate du gouvernement. Les minibus, je les assume. Quand Mennucci fait du covoiturage ou Masse propose d'accompagnerles gens aux bureaux de vote, personne ne dit rien. Mais Mme Carlotti est allée trop loin. Quand la ministre aux personnes handicapées, déclare : "Je n'ai qu'une idée en tête, faire gagner Patrick Mennucci", cela me révolte. J'ai un frère handicapé... A quoi sert-elle au gouvernement si sa seule préoccupation est M. Mennucci ? Qu'elle démissionne et vienne faire la campagne alors.
Allez-vous modifier votre fonctionnement pour ce second tour ?
Non. Il y aura des minibus et on pourra venir les filmer. Je n'ai rien à cacher. M. Mennucci veut me donner des leçons ? Quand j'organisais des transports pour lui dans les quartiers nord en 2002, ça ne l'a pas dérangé. A l'époque, je l'ai soutenu contre l'appareil du PS et cela m'a coûté cher.
La résorption de la fracture entre nord et sud de Marseille a été un de vos thèmes principaux. Les électeurs du nord ont bien réagi, ceux du sud moins... Ce thème n'est-il pas clivant ?
Au sud, les gens n'ont pas beaucoup voté, mais à l'est, mes scores sont bons. Je constate que là où le PS peut gagner la ville en 2014, les 11e et 12earrondissements, mon score n'est pas anodin... Et là où le FN peut empêcher la gauche de gagner, dans les 13e et 14e, les électeurs m'ont placée en tête.
Vous étiez la seule candidate d'origine maghrébine... Peut-on parler de vote communautaire vous concernant ?
Il n'y a pas de vote communautaire. Il y a le vote de Marseillais qui se retrouvent dans mon histoire, parce que c'est la leur. Les Marseillais qu'on n'écoute plus depuis très longtemps. Ceux qui font que l'abstention augmente et que le FN prend la place. Le PS a un double discours sur cette question. On ne peut pas faire le front républicain à Brignoles et le front anti-Ghali à Marseille.
Marseille peut-elle élire une maire d'origine maghrébine ?
En 2008, quand j'ai été désignée tête de liste à la mairie de secteur, on me posait déjà cette question. Les mêmes cadres du PS disaient : "Les blancs ne voteront pas pour elle." Je suis arrivée en tête dans tous les bureaux ! Y compris dans les noyaux villageois où il y a des maisons aussi coûteuses que sur la Corniche et dans des bureaux historiquement acquis au FN et à l'UMP.
Maintenez-vous vos positions sur la sécurité, symbolisées par votre appel à l'armée ?
Mes thèmes de campagne restent les mêmes : sécurité, éducation, transports. Bien sûr qu'il faut s'occuper d'économie et d'emploi... Mais sur la sécurité, il faut que le gouvernement apporte des moyens à Marseille, que la police municipale soit doublée et déployée dans tous les secteurs. Quant à l'armée, je ne vois pas pourquoi elle serait présente dans les rues de Paris et pas à Marseille. Pour les jeunes d'ici, l'uniforme serait le symbole que l'autorité est présente.
Comment vous mettrez-vous d'accord avec les autres socialistes sur la métropole Aix-Marseille contre laquelle vous avez voté au Sénat ?
Je ne suis pas contre la métropole. Mais tant qu'il n'y aura pas de contractualisation avec la ville de Marseille sur des projets concrets, elle restera une coquille vide. L'Etat doit donner plus !
On vous reproche votre proximité avec Jean-Noël Guérini. Pourquoi ne vous prononcez-vous pas pour son exclusion du PS?
Mme Carlotti a fait toute sa campagne sur ce thème... Ça a intéressé les Marseillais ? Harlem Désir dit que Guérini ne fait plus partie du PS, ça me suffit. Par principe, je ne demanderai pas son exclusion. Je ne suis ni procureur ni juge... Vous voulez que je remette en question la présomption d'innocence ? Que ceux qui la remettent en cause aujourd'hui fassent très attention. Un de ces jours, ils risquent d'en avoir besoin.
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